Âmes sensibles s’abstenir
Vers 1748, Voltaire tombe gravement malade lors d’un voyage entre Paris et Lunéville. Il reste alité pendant plusieurs jours, à l’auberge de la Cloche d’Or à Châlons, sans manger et avec une si forte fièvre que son secrétaire Sébastien Longchamp craint pour sa vie.
Puis, au bout de quelques jours, voyant Longchamp engouffrer devant lui deux grives rôties, une éclanche de mouton et une douzaine de rouge-gorges, il lève la tête péniblement et accepte de manger, ou plutôt de « sucer » un ou deux rouge-gorges, qui selon Longchamp, sont les « ortolans » du pays.
Le lendemain, ragaillardi, Voltaire reprend la route.
Longchamp raconte : « Que vous êtes heureux ! me dit M. de Voltaire , d’avoir un estomac et de digérer ! Il avait vu disparaître la moitié d’une éclanche de mouton et une entrée. On m’apporta ensuite deux grives rôties et une douzaine de rouge-gorges, qui sont les ortolans du pays. C’était alors leur saison.
Je demandai à M. de Voltaire s’il n’était pas tenté de sucer un de ces petits oiseaux : Oui, me dit- il, je veux essayer. Je lui en choisis deux des plus gras, et les portai, avec un morceau de mie de pain, sur son lit , où s’étant à moitié redressé, il en mangea une bonne partie et avec goût ; il demanda ensuite un verre de vin coupé d’un tiers d’eau, qu’il avala assez lestement. Après cela il me dit qu’il se sentait quelque disposition au sommeil ; qu’après que j’aurais fini de souper, je n’avais qu’à me coucher ; que le lendemain matin, à son réveil, nous partirions pour Lunéville. »

La recette des ortolans par Maïté, document de l’INA à voir ici
Âmes sensibles s’abstenir
