La Lorraine est formidable
Connaissez vous l’expression « avoir un bonnet à la Raucoux (Raucourt) ? »
Eh bien, c’est presque une « expression lorraine », puisque c’est pour illustrer la vie de Mlle Saucerotte, dont les parents sont lorrains et originaires de Raucourt, que cette boutade va être inventée et faire le tour des salons parisiens en octobre 1776.
Les bonnets à la Raucoux sont caractérisés principalement par un petit panier percé qui les surmonte. Ils illustrent la vie de Mlle Raucourt, talentueuse comédienne de l’Académie royale, qui s’était distinguée par sa vie dispendieuse et le nombre de ses amants et amantes.
Eh oui, Mlle Raucourt, illustre comédienne, était connue, entre autres, pour dépenser plus que de raison.
Deux ouvrages écrits par Hector Fleischmann, né en 1882 et Henri Daragon né en 1870, expriment le mépris effarant et le jugement portés par les bons bourgeois de l’époque sur les femmes qui réussissaient au XVIIIe siècle.
Entre voyeurisme et jugement lapidaire, les deux auteurs passent au crible le comportement et les « mœurs » de Mlle Raucourt, actrice en vogue dans la deuxième partie du XVIIIe siècle, qu’ils nomment « la Raucourt ».
Remarquez que lorsque les femmes réussissent, pour bien les mépriser, on leur accole l’article « la », histoire de bien les dévaluées. La Pompadour, la Karsavina, la Du Barry, la Clairon, la Carriera (peintre), la Graffigny, la Raucourt…
Etonnamment, on ne le fait pas pour les hommes qui réussissent, on ne dit pas le Watteau, le Diderot, le Voltaire…

Marie-Antoinette-Joseph Saucerotte, dite Françoise Raucourt et Mlle Raucourt, née le 3 mars 1756 à Paris et morte le 15 janvier 1815 dans la même ville, est une actrice, courtisane et libertine française célèbre de la fin du XVIIIe siècle.
Elle est la fille de François Saucerotte dit Raucourt, comédien ambulant, originaire du village de Raucourt en Lorraine dont il prit le nom et d’Antoinette de La Porte, elle aussi originaire de Lorraine, ancienne domestique à la cour du roi Stanislas, duc de Lorraine.
En 1772, Mlle Raucourt connaît dès l’âge de 16 ans un immense succès à la Comédie-Française, dû autant à sa beauté qu’à son talent.
Entretenue dès l’âge de 17 ans par de riches protecteurs tout en affichant son homosexualité et ses liaisons féminines dont l’actrice Sophie Arnould, elle mène un train de vie luxueux et tapageur qui provoque l’indignation. En 1777, renvoyée de la Comédie-Française et couverte de dettes, elle s’enfuit de France avec sa compagne du moment Mme Souck, mais à Hambourg, les deux femmes sont condamnées pour escroquerie et emprisonnées quelque temps. On ignore ce qu’elle devient ensuite pendant près de deux ans. En 1779, elle revient en France et est réintégrée à la Comédie-Française grâce à la protection de la reine Marie Antoinette qui semble avoir payé ses dettes. Elle retrouve alors la faveur du public dans des rôles plus graves.
Malgré ses généreux amants, elle est présentée dès 1773 comme « la reine des tribades » et la rumeur fait d’elle la grande-maîtresse d’une prétendue « secte des Anandrynes », société secrète lesbienne qui aurait été réservée à l’aristocratie et à laquelle aurait appartenu Marie Antoinette. En 1779, elle est la destinataire de l’Épître à une jolie lesbienne.
Mlle Raucourt, Eugène Devéria