[Paris, couvent Sainte-Elisabeth, octobre 1940] Princesse opiomane


Chassée de Lorraine par l’arrivée du roi Stanislas, Françoise de Graffigny se retrouve en terre ennemie (la France) à Paris. Absolument sans argent, elle se réfugie au couvent des Filles de Sainte-Elisabeth (de Hongrie, l’église existe toujours).

La bonne Grosse accepte d’y être dame de compagnie de la Princesse de Ligne, une jeune femme de trente ans, qui la fait rire aux larmes :
« J’ai pleuré hier tout le jour a la grille, et j’ai ris a pasmer jusqu’a deux heures apres minuit avec ma compagnes – ris de betise, comme nous rions ! Elle est charmante, et tout a fait a notre ton. C’est une grande ressource pour moi. ».

Mais un soir en rentrant de Versailles , Françoise retrouve sa nouvelle amie avec la moitié du visage paralysé :
« Me revoici dans mon cloitre depuis hier, mon ami. J’ai trouvé ma compagne avec une paralisie sur le visage qui seroit bientot une apoplexie si l’on n’y metoit ordre. Elle a la bouche tournée jusqu’a l’oreille et un oeil ouvert, sans le pouvoir fermer, et fixe. Cela la rend, de belle qu’elle etoit, hideuse. Elle ne soufre point. Cependant elle a eté seignée, et demain, l’emetique. On dit cela fort serieux. ».

Henriette-Eugénie de Béthisy de Mézières, princesse de Ligne et marquise de Dormans, née le 17 avril 1710, soigne sa mélancolie avec une potion appelée la Thériaque, (dont l’ingrédient principal est l’opium), elle est en réalité devenue opiomane et ses nombreux maux et malaises son liés à son addiction.

La préparation de la thériaque nécessitait plus d’un an et demi (car elle devait fermenter) et faisait appel à plus de soixante-quatre ingrédients végétaux, minéraux et animaux des plus variés dont le castoréum, l’opium, la vipère et la scille.

La thériaque, qui passait pour une panacée, devait la majeure partie de son action à l’extrait d’opium qu’elle renfermait (environ 25 mg pour 4 grammes). Elle ne fut supprimée du Codex qu’en 1884.

Opium de Smyrne 120 g
gingembre 60 g
iris de Florence 60 g
valériane 80 g
acore aromatique 30 g
rapontic (rhubarbe) 30 g
quintefeuille (potentille) 30 g
racine d’aristoloche probablement Stephania tetrandra (en) à l’origine[réf. nécessaire] 10 g
racine d’asarum 10 g
racine de gentiane 20 g
racine de meum 20 g
bois d’aloès 10 g
cannelle de Ceylan 100 g
squammes de scille 60 g
dictame de Crète (marjolaine) 30 g
feuilles de laurier 30 g
feuilles de scordium (Teucrium scordium) 60 g
sommités de calament 30 g
sommités de marrubes (Marrubium vulgare) 30 g
sommités de pouliot des montagnes (peut-être une espèce de menthe ou de germandrée) 30 g
sommités de germandrée petit-chêne (“chamaedrys”) 20 g
sommités de chamaepitys (un bugle soit Ajuga iva, soit Ajuga chamaepitys) 20 g
sommités de millepertuis 20 g
rose rouge 60 g
safran 40 g
fleurs de stoechas (lavande) 30 g
écorce sèche de citron 60 g
poivre long 120 g
poivre noir 60 g
fruits de persil 30 g
fruits d’ammi 20 g
fruits de fenouil 20 g
fruits d’anis 50 g
fruits de « séseli de Marseille » (Seseli tortuosum) 20 g
fruits de daucus de Crète (carotte) 10 g
fruits d’ers (Vicia ervilia 200 g
fruits de navet 60 g
fruits de petit cardamome 80 g
agaric blanc (champignon de Paris) 60 g
suc de réglisse 120 g
cachou 40 g
gomme arabique 20 g
myrrhe 40 g
oliban 30 g
sagapénum (gomme séraphique) 20 g
galbanum (extrait de férule) 10 g
opopanax 10 g
benjoin 20 g
castoréum 10 g
mie de pain 60 g
terre sigillée 20 g
sulfate de fer sec 20 g
bitume de Judée 10 g

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