Mme de Graffigny se trouve à Paris depuis un an, au service de la duchesse de Richelieu, laquelle atteinte de tuberculose est mourante. La bonne Grosse veille, une nuit sur deux, sa bonne amie et raconte dans une lettre à son ami lunévillois, Panpan Devaux, la nuit qu’elle vient de passer, terrorisée par un violent orage.
Le mardi 12 [juillet 1740], a minuit
Je ne comprends pas, mon ami, pourquoi je n’ai rien eu a te dire depuis dimanche, et ce qu’il y a de plaisant, c’est que je n’ai encore rien a te dire aujourd’huy, a moins que je ne te parle de l’orage qu’il a fait cette nuit.
Je dormais bien en femme qui avoit veillé l’autre nuit, et qui devoit veiller celle-ci, quand le fracas m’a eveillé en surseaut. J’ai cru mourir de peur.
Les vapeurs s’en sont melées ; l’eau de fleur d’orange est venue a mon secour.
Enfin je m’en porte tres bien, mais pas si bien qu’une pauvre religieuse des Magdelonette, qui sont fort pres d’ici. Le tonnere est tombé sur son lit, y a mis le feu et lui a grillé les pieds. Elle est peut-etre morte a present.
Il a tué un pretre a l’autre bout de Paris qui c’etoit mis sur un sopha, ayant trop chaut sur son lit.
Enfin il est tombé a deux ou trois endroits ; aussi les coup avaient-ils l’air de vous peter dans la main.
Notre pauvre malade [la duchesse de Richelieu] en a pati, non pas qu’elle craigne, mais les orages sont toujour bien mauvais dans son etat.
Cependant la journée n’a pas eté mauvaise.
Bonsoir, mon ami, je t’embrasse et je t’aime de tout mon coeur.
Le couvent des religieuses de l’ordre de Marie-Madeleine, les Madelonnettes ou Magdelonettes a été construit de 1620 à 1637. On le trouve sur le plan de Gomboust datant de 1652.
Les religieuses accueillaient les prostituées, les jeunes filles séduites et placées par leur famille.
Rapidement détourné de son projet initial, le couvent est dans les faits une maison de correction et un lieu d’enfermement arbitraire pour femmes jusqu’en 1790.
On y enferme des prisonniers politiques à la Révolution française, entre 1793 et 1794, puis à nouveau des femmes après 1795.
Entre 1831 et 1836, les Madelonnettes sont une prison pour enfants, avant de devenir une prison pour adultes et enfants.
L’ensemble des bâtiments sera détruit, entre 1865-1866, lors du percement de la rue de Turbigo.Devenue, maison de force et maison de correction, elle accueillait également les enfants mineurs. Les durées d’enfermement n’étaient pas définies.