L’excentricité Lorraine à Paris !

Au XVIIIe siècle, l’« exotisme » lorrain semble avoir fait sensation à Paris sous les traits de la maréchale de Mirepoix, fille probable* du duc Léopold et de sa maîtresse madame de Beauvau-Craon. (*en attente de confirmation)
La maréchale de Mirepoix (ex princesse de Lixheim ) est sans aucun doute la plus excentrique des enfants de la cour de Lorraine !
Sa charge de dame du palais de la reine Marie Leczinska ne l’empêche nullement d’être le soutien sans faille des maîtresses du roi : madame de Pompadour… puis madame du Barry.
La belle Lorraine est célébrée pour son esprit et son train de vie, elle est « Reine » de Paris où elle tient salon et dépense sans compter pour elle et pour ses amis, elle aime le luxe et se ruine au jeu malgré cent mille livres de rente, qu’importe c’est Louis XV qui paye ses dettes !
Les chiens ne font pas des chats, sa mère madame de Beauvau-Craon avait englouti la fortune du duc de Lorraine…

Voici ce qu’écrit Mme de Créquy au sujet de la duchesse de Mirepoix :
« C’était la femme du monde la mieux calculée pour son profit ou son agrément personnel, où dominait toujours le besoin qu’elle avait d’argent, et de beaucoup d’argent, car elle aurait fait dévorer dix royaumes aux banquiers du Passe-Dix et du Vingt-et-Un. »

Les frères Goncourt :
« Nulle femme n’était plus aimée, plus aimable que cette amusante duchesse de Mirepoix, toujours désordonnée, noyée d’embarras d’argent, ruinée par le jeu, perdue de contrariété et de gêne au milieu de ses cent mille livres de rente ; et cependant, quand elle s’échappait de Versailles et tombait à Paris, toujours gaie, sans humeur, douce, complaisante, gracieuse à tous, empressée à plaire, ne demandant que des services à rendre, si bonne qu’elle oubliait à faire oublier ses lâchetés à la cour et à remplacer autour d’elle l’estime et la sympathie. »

M. Walpole a donné d’elle le portrait suivant dans une lettre adressé à M. Gray : 
« L’esprit de madame de Mirepoix est excellent dans le genre utile, et le peut être également, quand il lui en plaît, dans le genre agréable. Ses manières sont froides , mais fort honnêtes ; et elle cache qu’elle est de la maison de Lorraine , mais sans l’oublier jamais elle-même. Personne en France ne connaît mieux le monde, et personne n’est mieux avec le roi. Elle est fausse , artificieuse et insinuante au-delà de toute idée , lorsque son intérêt le demande , mais naturellement indolente et timide. Elle n’a jamais eu d’autre passion n que celle du jeu, et perd cependant toujours. Elle fait assidûment sa cour , et le seul but qu’elle a en vue par cette conduite , est d’arracher quelque argent au roi, pour payer ses dettes , ou pour en contracter de nouvelles, dont elle s’acquitte le plus tôt qu’il lui est possible. Elle a affiché la dévotion, pour se faire nommer dame du palais de la reine; et le jour après celui où elle fut élevée à cette place, on l’a vue aller avec mad. de Pompadour, dans .son carrosse, assise sur le devant. Lorsque le roi fut frappe par un assassin, ce qui lui causa une grande frayeur , mad. de Pompadour éprouva également une peur panique, et alla consulter M. d’Argenson, pour savoir si elle ne ferait pas bien de quitter à temps la Cour. Ce seigneur, qui la haïssait, lui conseilla de prendre ce parti. Madame de Mirepoix lui persuada, au contraire de rester. Lorsque le roi se trouva rétabli, la maréchale obtint une partie du crédit de la maîtresse. »

Dans les souvenirs (apocryphes) de Mme de Créquy, on trouve également un portrait de notre dame : 
” la Maréchale de Mirepoix allait souper chez Mme du Barry, d’où vient qu’elle avait abdiqué les amitiés et les principales relations de sa jeunesse. C’était la personne la plus naturellement gracieuse et la plus distinguée, noblement ; mais c’était la femme du monde la mieux calculée pour son profit ou son agrément personnel, où dominait toujours le besoin qu’elle avait d’argent, et de beaucoup d’argent, car elle aurait fait dévorer dix royaumes aux banquiers du Passe-Dix et du Vingt-et-Un. Elle n’avait jamais éprouvé ni pu comprendre d’autre passion que celle du jeu. Si la Maréchale de Mirepoix avait joué moins malheureusement ou plus modérément, on peut être assuré qu’elle se serait maintenue dans la convenance et la dignité les plus parfaites. »

La comtesse de Genlis en dressa aussi le portrait : 
“[i] … Sans avoir jamais passé pour une beauté régulière, elle avait eu, dans sa jeunesse , une taille charmante et le plus beau teint du monde, et elle avait conservé tant de fraîcheur dans un âge très avancé que, quand elle se cassa la jambe, chacun disait, en la voyant sur sa chaise longue, qu’elle avait plutôt l’air d’une femme en couches que d’une vieille de soixante-dix-huit ans… 
Son esprit était aussi jeune que sa figure; cependant il était plus agréable qu’étendu. Ce qui la distinguait particulièrement, c’était une grâce infinie et un ton parfait; aussi ses décisions en matière de goût et de convenance étaient généralement respectées…
Sa politesse était aisée, son humeur égale, et, sans être exigeante, elle savait maintenir son rang. Elle avait de la chaleur sans enthousiasme, du calme sans insipidité, de la bienveillance sans fadeur; jamais ni aigreur, ni malignité ; enfin on pouvait être plus piquante, il était impossible d’être plus aimable; elle l’était dans toute l’étendue qu’on devrait donner à ce mot, c’est-à-dire qu’on l’aimait et qu’on se plaisait avec elle…
Ce qui étonnait le plus, c’était que, montrant autant de jugement dans la conversation, elle en eût aussi peu dans la conduite de ses affaires. Jamais on n’a tant aimé le changement dans les choses, avec autant de fidélité pour les personnes. A peine était-elle établie à grands frais dans une maison qu’elle voulait en changer… ” 

Gabrielle-Charlotte Françoise d‘Hénin-Liétard (1729-1809), vicomtesse de Cambis, née princesse de Chimay est poussée dans le lit du roi par sa tante, Mme de Mirepoix.

Anne Marguerite de Beauvau-Craon, maréchale de Mirepoix par Gobert. Collection du château de Haroué vendue en 2015.
La maréchale de Mirepoix verse du thé à 15-Mme de Vienville.
Le thé à l’anglaise © Michel-Barthélemy Ollivier, 1763.

Laisser un commentaire