Falbala : on renonce plus facilement au plaisir d’aimer qu’au désir de plaire…

Définition du mot ” falbala ” par la marquise de Jaucourt

Suzanne Marie de Vivans, marquise de Jaucourt, (1702-1772), contributrice occultée de l’Encyclopédie Diderot, a écrit plusieurs articles sur la mode, et ils valent leur pesant d’or !

FALBALA, s. m. bandes d’étoffe plissées & festonées, qui s’appliquent sur les robes & jupons des femmes.
C’est la garniture des jupons qui est particulierement appellée falbala ; elle est connue aussi sous le nom de volans ; celle des robes s’appelle communément pretintaille. Les falbalas sont placés par étages autour du jupon ; cette mode est, dit-on, fort ancienne, mais le mot est nouveau.

On conte que deux de ces hommes chargés de modes & de ridicules, & qui se ruinent pour être aimables, traversoient les salles du palais ; les petites marchandes leur offrirent de tout selon l’usage : il n’existe rien, dit l’un, que l’on ne trouve ici ; vous y trouverez même, répondit l’autre, ce qui n’existe pas : inventez un mot qui ne soit qu’un son sans idée, toutes ces femmes y en attacheront une ; falbala fut le mot qui s’offrit, & des garnitures de robes furent présentées avec assûrance sous ce nom qui venoit d’être fait, & qu’elles porterent depuis.

Les savans amateurs de l’antiquité feroient remonter, s’ils pouvoient, l’origine des falbalas jusqu’au déluge ; c’est bien assez pour l’honneur de cette mode, qu’elle ait passé des Perses aux Romains : divers législateurs ennemis du luxe l’ont, dit-on, condamnée ; mais les graces & le goût ne reçoivent de lois que de l’amour & du plaisir.

Cette grande roue du monde qui ramene tous les évenemens, ramene aussi toutes les modes, & fait reparoître aujourd’hui les falbalas avec plus d’éclat que jamais, les plus riches étoffes en sont ornées, les plus communes en reçoivent du relief, & toutes les femmes, les belles, les laides, les coquettes, & les prudes, ont des falbalas jusque sur leurs jupons les plus intimes : les dévotes même en portent sous le nom de proprété recherchée : on renonce plus facilement au plaisir d’aimer qu’au desir de plaire.

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