Un botaniste lorrain vole le secret du rouge carmin en se faisant passer pour un Catalan

[Les Lorrains sont formidables]

C’est l’histoire d’un tout petit scarabée mexicain que l’on a longtemps confondu, en Europe, avec une graine en raison de son secret bien gardé par les Espagnols qui en monopolisaient le commerce.

A l’instar du pourpre, pigment rouge violet issu d’un coquillage et dont le coût de fabrication était si élevé qu’il était réservé aux dieux et aux dirigeants, l’histoire de la cochenille n’est pas banale non plus.

Exporté par tonnes par les Espagnols qui ont découvert son utilisation chez les Aztèques lors de leur conquête du Mexique, ce coléoptère livre une gamme étonnante de rouges carmin et il devient très prisé en Europe à partir du XVIe siècle.

C’est simple, la valeur de ce petit insecte se situe juste après l’or et l’argent, raison pour laquelle les Espagnols verrouillent immédiatement son marché.
Pour en garder le secret, et histoire de semer la confusion, ils n’hésitent pas à brouiller les pistes en nommant « grana » cet insecte desséché qui se présente, après traitement, sous la forme de grains desséchés, noirs ou rougeâtres.
Graine ou insecte ? Le doute n’est levé qu’en 1729, après un débat musclé entre deux scientifiques.

C’est alors qu’intervient notre botaniste lorrain, Thiéry de Menonville.
EN 1774, il décide d’agir et de voler le secret de la cochenille en se rendant au Mexique.
Il s’y fait passer pour un médecin catalan, et apprend, l’air de rien, l’art d’élever le coléoptère et de planter le nopal (cactus), plante nourricière de la cochenille.
Et, ni une ni deux, le « fourbe » enlève la cochenille et la transporte jusqu’à à Saint-Domingue où il réussit à la multiplier dans son jardin de Port-au-Prince. Pour cet exploit, il reçoit le titre de botaniste du roi peu après son retour du Mexique.
Son élevage disparaît après sa mort, mais heureusement, il a le temps d’écrire un livre sur l ‘élevage du scarabée qui vaut de l’or !

Nicolas-Joseph Thiéry de Menonville (Saint-Mihiel, France, 18 June 1739 – Port-au-Prince, Saint-Domingue, 1780)

Dédicace spécial à mon fils Arthur Debert

Traité de la culture du nopal et de l’éducation de la cochenille dans les colonies françaises de l’Amérique, précédé d’un voyage à Guaxaca.  (édité par Veuve Herbault, Cap-Français, 1786, réédité en 1787).
Le Nopal (Paris, 1787).

Rouge carmin utilisé dans la peinture
Et dans la décoration.
Musée d’art de Denver, Colorado.

Récolte de la cochenille, détachés des raquettes de nopal à l’aide d’une queue d’écureuil ou de cerf, sont recueillis dans une jatte.
José Antonio de Azalte y Ramirez,
Memoria sobre la naturaleza, cultiva, y benficia de la grana, Mexico, 1777.
Young Woman With a Harpsichord, 1735-1750
Artiste inconnu, Mexico
Musée d’art de Denver
Musée d’art de Denver, Colorado

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